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Réforme du collège...

mardi 19 mai 2015

Le Capital à la manœuvre !

« Tout changer pour que rien
ne change
 », cette célèbre formule du film Le Guépard illustre assez bien la politique
éducative menée depuis
2012 par les ministres « de
gauche » Peillon, Hamon et
Vallaud-Belkacem. Loi
d’orientation, décrets, circulaires et mesures ministérielles se succèdent à un rythme
effréné pour que l’École publique reste dans le rôle que
lui a assigné la classe capitaliste dès ses origines : « Le
but de l’école n’est pas l’éducation de l’enfant, mais la formation de la société bourgeoise
 » (Discours de Jules Ferry
à l’Assemblée Nationale le
14 février 1889). Aujourd’hui, la communication ministérielle est plus habile
(notamment à travers la manipulation des statistiques),
mais elle ne peut dissimuler
le lien étroit entre les réformes imposées et les injonctions du Capital : l’école doit
d’abord produire de
« l’employabilité » à moindre
coût et assurer à travers ses
programmes la pérennité du
système d’exploitation capitaliste.
La réforme du collège,
concoctée par Najat Vallaud-Belkacem, et prévue pour
2016, répond clairement à
ces injonctions, comme
l’avait fait en 2005 celle de
Fillon sur le socle commun.

Appauvrissement
des contenus

Les connaissances, la capacité de réflexion et les savoir-faire sont développés, au
collège, par l’étude d’une
dizaine de disciplines, selon
des programmes annuels et
des horaires hebdomadaires
définis nationalement. La
réforme prévoit de réduire
de 20% ces horaires (par
exemple en français, passer
de 4 heures à 3 heures par
semaine), et de fixer les
contenus enseignés dans des
programmes triennaux, laissant les enseignants décider
de leur progression annuelle. Cette réduction de 20%
serait compensée, prétend la
ministre, par de
«  l’accompagnement personnalisé » et des « projets interdisciplinaires », autant de
dispositifs menés en classe
entière (faute de moyens
suffisants), et déjà testés au
lycée avec ce constat global :
les élèves y perdent leur
temps.

La lecture des nouveaux
programmes révèle l’opération idéologique qui est à
l’œuvre :
- allègement (quasi disparition du latin/grec ; en histoire, des chapitres « bien choisis », comme l’Humanisme
ou les Lumières, deviennent
facultatifs, pour laisser la
place au catéchisme républicain de
« l’enseignement moral et
civique » ; en français, plus
de corpus d’œuvres littéraires, etc.)
- recul de leur dimension
scientifique et technique
(SVT et technologie disparaissent en 6ème au profit
d’un vague « enseignement
globalisé des sciences et
techniques » ; plus aucun
dédoublement pour l’expérimentation scientifique et
technologique n’est garanti).
Derrière le pompeux jargon de ces programmes,
l’opération de décervelage
de la jeunesse, accélérée sous
Sarkozy, se poursuit.

Explosion du cadre
national : « l’autonomie », outil de privatisation du système éducatif.

Aux deux mesures structurelles évoquées ci-dessus
(20 % de baisse horaire et
programmes sur 3 ans et non
plus annuels) s’ajoute une
disposition gravissime pour
l’avenir du système éducatif : le ministère laisserait
chaque établissement décider des disciplines qui seront frappées par cette ponction, des disciplines qui récupéreront des heures pour
travailler en petits groupes,
et de la répartition des contenus enseignés d’abord entre
le CM1 et la 6ème (cycle 3),
puis entre la 5ème et la 3ème
(cycle 4). Cette
« autonomie », qui ne sera
pas celle des équipes enseignantes mais celle des
« managers locaux » (les
Chefs d’établissement et
leurs gardes rapprochées de
« professeurs-coordonnateurs »), sonne un peu
plus le glas d’une Éducation
nationale déjà très inégalitaire.
En effet, les inégalités scolaires liées à l’origine sociale
sont révélées par les chiffres
officiels (site du ministère), qui comparent les taux de maîtrise des
élèves de Troisième en français et en mathématiques
pour 2013, selon la catégorie
du collège (en Éducation
prioritaire (ZEP), public hors
Éducation prioritaire (HorsZEP), privé).
L’écart flagrant entre collèges ZEP et Hors-ZEP (24 points en français et 29 points en mathématiques, en 2014) n’a
cessé d’augmenter depuis
2007, sous l’effet conjugué
des suppressions de postes,
de l’assouplissement de la
carte scolaire et de la fameuse « autonomie » laissée aux
collèges en ZEP.
Bien loin de corriger ces
phénomènes, la réforme Vallaud-Belkacem va accroître
la gestion locale de la pénurie, la mise en concurrence
entre établissements, et dessine ainsi les contours d’un
collège à l’anglo-saxonne : le
privé et son offre de formation diversifiée pour les riches, le public et son socle
commun minimaliste pour
les pauvres.

Soutenir et amplifier
la riposte, pour une
prise de conscience
politique.

Il n’est pas étonnant qu’une
réforme répondant si bien
aux exigences du Capital ait
reçu l’aval du MEDEF et de
ses acolytes de la CFDT et de
l’UNSA (vote « pour » au
Conseil supérieur de l’Éducation en avril 2015).
Pas étonnant non plus que
face à une telle attaque
contre le Second degré, la
colère monte dans les salles
des professeurs et au sein
des associations de spécialistes. La grève du 19 mai, lancée par la FSU, la CGT, FO et
SUD, est une étape importante de la mobilisation, que
soutient pleinement l’URCF,
et qui doit s’élargir aux parents d’élèves et à leurs enfants.
Mais au-delà des mots
d’ordres syndicaux, globalement justes (« Pour une autre
réforme du collège
 »), les communistes rappellent l’enjeu
politique de cette nouvelle
attaque contre l’école publique : la classe capitaliste n’a
que faire de l’éducation des
enfants, seul compte pour
elle le maintien de ses profits
et du système d’exploitation
qui les permet ; et seule une
société socialiste, débarrassée de ce système inique,
rendra l’école à sa jeunesse et
à son peuple.